La sortie récente de la mini-série sud-coréenne Aema sur Netflix (août 2025) remet en lumière une facette souvent marginale de l’histoire du cinéma : celle de l’érotisme institutionnalisé, entre fantasme mis en scène et coulisses pleines de zones d’ombre. En revenant sur la genèse du tout premier film érotique produit sous le régime militaire de Chun Doo-hwan, la série questionne autant l’histoire d’un pays que les dynamiques de pouvoir au sein de l’industrie audiovisuelle.
Mais Aema n’est pas un cas isolé. Ces dernières années, plusieurs œuvres ont choisi de raconter — parfois avec ironie, parfois avec gravité — ce que signifie créer des films classés X, à quelles conditions, et avec quels effets sur les vies de celles et ceux qui les fabriquent. Voici une sélection qui prolonge le sujet en s’intéressant à des personnages réels ou fictifs ayant fait de l’érotisme un business, un art… ou un combat.
Madame Claude (2021, Netflix)
Réalisé par Sylvie Verheyde, ce film retrace la trajectoire de Fernande Grudet, alias Madame Claude, qui contrôlait dans les années 60 et 70 un réseau d’escort girls de luxe lié aux plus hautes sphères du pouvoir français et international. Plus qu’un simple biopic, Madame Claude met en scène une femme qui tire les ficelles du désir masculin et doit, pour maintenir son empire, composer avec les manipulations politiques, policières et économiques. Une relecture féministe en creux.
The Naked Director (Japan, Netflix, 2019–2021)
Basée sur l’histoire vraie de Toru Muranishi, cette série japonaise en deux saisons suit l’ascension d’un ancien vendeur devenu figure de proue du porno japonais dans les années 80, en pleine libéralisation des mœurs et montée en puissance de la VHS. Si The Naked Director joue parfois la carte de la surenchère esthétique, elle brosse surtout le portrait d’un système industriel et culturel en mutation, entre censure, économie souterraine et obsession pour la rentabilité.
Le Touche-à-tout (Erşan Kuneri, Turquie, Netflix)
Créée et interprétée par Cem Yılmaz, cette série satirique turque suit un ancien réalisateur de films érotiques qui, dans les années 80, cherche à se réinventer en explorant d’autres genres populaires : péplum, polar, horreur, SF… Derrière l’humour absurde, Le Touche-à-tout interroge la fabrication du cinéma et le regard posé sur les corps dans des sociétés encore très normatives. Une proposition étonnante et libre venue d’un pays où la critique sociale passe souvent par le détournement.
Pourquoi ces œuvres résonnent-elles avec Aema ?
Chaque œuvre ici présente une approche différente du cinéma érotique, mais toutes documentent un même phénomène : la marchandisation du désir et ses implications sociales, politiques et personnelles. Qu’elles choisissent le registre du drame, de la satire ou du portrait biographique, elles confrontent leur spectateur·rice à une industrie où le fantasme à l’écran masque souvent une réalité bien plus trouble hors-champ.